Bernard Bajolet a-t-il dénoncé des agents de la DGSE ?
Auditionné, le 27 janvier dernier, par la commission de la défense nationale, Bernard Bajolet, coordonnateur du renseignement à la Présidence de la République, a fait une énorme bourde en révélant que Pierre Camatte, l’un des 8 otages français retenus à l’étranger, était en réalité un agent de la DGSE et pas un simple humanitaire comme veut faire croire le gouvernement.
Le compte-rendu, mis en ligne sur le site de l’Assemblée vendredi 30 janvier, comporte un scoop :
“M. Guillaume Garot. Quelles informations pourriez-vous nous transmettre sur les agents de nos services retenus en otage, leur nombre, leur situation ? Quelles sont les perspectives les concernant ?
M. Bernard Bajolet. Nous avons actuellement huit otages. Un au Mali, Pierre Camatte, quatre au Soudan, un en Somalie et deux en Afghanistan.”
On dénombrait alors certes 8 otages français à l’étranger : les deux journalistes de France 3, en Afghanistan, un agent de la DGSE (en Somalie), les autres étant des humanitaires, au Soudan. Mais à en croire Bajolet, tous seraient en fait des agents sous couverture …
Contacté ce vendredi après-midi, l’Elysée n’a pas encore répondu à nos questions, mais il est pour le moins douteux que Bernard Bajolet ait ainsi “grillé” ou “balancé” les otages français retenus à l’étranger, ne serait-ce que parce que la présentation qu’il en donne correspond trait pour trait aux otages français (dont un seul émarge officiellement à la DGSE).
Pour ne pas compliquer les négociations qui avaient cours pour la libération de Pierre Camatte (qui a finalement été libéré mardi dernier), le Canard Enchaîné avait préféré ne pas en parler, mercredi dernier, se bornant à noter l’autre problème de com’ de l’Elysée, au sujet des deux journalistes de France 3 otages en Afghanistan :
“A l’heure actuelle, nous avons déjà dépensé plus de 10 millions d’euros pour nous occuper de cette affaire (…). Je mets en avant le sens des responsabilités”, a canonné le général Georgelin sur Europe 1, tout en martelant avec un culot d’acier trempé : “Coryez-moi, ce genre d’opérations, moins on en parle, mieux c’est !”
Voilà qui nous rappelle quelque chose. Depuis leur enlèvement le 30 décembre, l’Elysée et le ministère ed la Défense imposent kle silence sur les otages, nous rabâchent qu’en parler ferait monter les enchères et mettrait gravement en péril les négociatiosn pour leur libération.
Résultat : le premier qui en a causé et s’est plaint de “l’imprudence coupable” de nos confrères s’appelle Nicolas Sarkozy, chef des armées; le deuxième, Claude Guéant, chef bis de l’Elysée; le troisième, donc, Georgelin, première gâchette du pays.
On notera également que la gaffe de Bajolet était d’autant plus malvenue que les ravisseurs de Pierre Camatte menaçait de l'executer, ce 31 janvier, lendemain de la publication de son audition sur le site web de l’Assemblée (l’ultimatum fut finalement repoussé).
La question reste enfin de savoir pourquoi aucun des 44 autres députés présents n’a posé plus de question, s’ils croient tous eux aussi que tous les otages français (humanitaires et journalistes compris) sont en fait des espions…